GENERALITES

– – – – – – – – – – – – Présentation et résumé

– – – – – – – – – – – – Pertinence de la recherche

– – – – – – – – – – – – Témoignages académiques

– – – – – – – – – – – – Table des matières détaillée

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RECHERCHE

– – – – – – – – – – – – Introduction et interrogations

– – – – – – – – – – – – Cadre théorico-méthodologique

– – – – – – – – – – – – Terrain : les récits de voyageurs

– – – – – – – – – – – – Interprétation et analyse des récits

– – – – – – – – – – – – Conclusion / Appendices / Biblio.


DIVERS

– – – – – – – – – – – – Travaux de recherche 2008-2009

– – – – – – – – – – – – Bricolage de pensées 2008-2010

– – – – – – – – – – – – Citations : sources d’inspiration

– – – – – – – – – – – – Quelques photos de voyageurs



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La symbolique sacrée du voyage initiatique

à travers les rites de passage : séparation, marge et agrégation

Par Éric Bourdeilh, le 18 décembre 2008
Essai présenté dans le cadre du séminaire
"Aspects symboliques de la communication"
À l’Université du Québec à Montréal (Canada)

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TABLE DES MATIERES


INTRODUCTION

1. LES RITES DE PASSAGE : CADRE THEORIQUE
-- 1.1 Concepts clés : le rite, le rituel et le rite de passage
-- 1.2 L’invariable déroulement des rites de passage
------ 1.2.1 Les rites de séparation, ou phase préliminaire
------ 1.2.2 Les rites de marge, ou phase liminaire
------ 1.2.3 Les rites d’agrégation, ou phase postliminaire
-- 1.3 La symbolique du passage : pivot de l’anthropologie de Van Gennep

2. LE VOYAGE INITIATIQUE : REFLEXION CRITIQUE
-- 2.1 Contexte : le phénomène du voyage initiatique  
------ 2.1.1 La mythologie des voyages
------ 2.1.2 Le voyage comme mode d’éducation à l’altérité
-- 2.2 Le voyage initiatique e(s)t le rite de passage
------ 2.2.1 Le centre commun entre le rite et le voyage 
------ 2.2.2 Les trois phases du voyage initiatique
-- 2.3 Le voyage initiatique : un pont symbolique entre les cultures

CONCLUSION

LEXIQUE

BIBLIOGRAPHIE


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 « Comme la plante, le jeune initié meurt à l’enfance pour naître à la vie adulte.Les rites ont pour fonction de mettre en scène ce mystère »  (Erny, 1981, p.45).

« Pour les groupes, comme pour les individus, vivre c’est sans cesse se désagréger et se reconstituer, changer l’état de la forme, mourir et renaître » (Van Gennep, 1981, p.272).


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INTRODUCTION      

« Un phénomène est qualifié de "symbolique" si l’expérience que nous en avons est décrite dans le contexte de la communication inter-humaine » (Pottier, 1994, p.22). Puisque le voyage implique de multiples rencontres et relations avec l’Autre (avec les autres cultures, avec la diversité naturelle et avec le monde des idées)[1], et donc une interprétation des symboles de lAutre, il est alors pertinent de se demander s’il est symbolisme plus universel que celui du voyage. Aussi, cet essai tente d’apporter des éclaircissements sur les questions suivantes : dans quelle mesure l’univers du voyage est-il pénétré et chargé de symbolisme ? Et dans quelle mesure l’expérience du voyage initiatique est-elle constructrice d’une identité spirituelle et culturelle ?

Le voyage – qu’il soit quête de sens, quête spirituelle, quête initiatique, évasion loin de la dure réalité, etc. –  relève de l’imagination symbolique ; une imagination symbolique « redresseuse d’équilibre » (un équilibre vital, psycho-social, anthropologique et universel), ouvrant la voie vers un avenir figuré et initiatrice d’un humanisme ouvert (Durand, 1984, p.115-130). Concrètement, en dépassant les épreuves rencontrées sur son passage – épreuves qui, comme les rites, permettent l’expression des valeurs et des émotions – le voyageur peut notamment désapprendre la peur (Bachelard, 1948, p.398). De même, « par les mort et (re)naissance symboliques qu’ils promeuvent lors des rites préliminaires et postliminaires, les rites de passage sont un apprivoisement de la mort » (Goguel d’Allondans, 2002, p.28).

Il est peu fréquent qu’un rite de passage soit organisé pour une seule personne ; néanmoins, « qu’il s’agisse de collectivités ou d’individus, le mécanisme est toujours le même : arrêt, attente, passage, entrée, agrégation » (Van Gennep, 1981, p.39). En ce sens, dans le cadre de ce travail, nous étendrons et appliquerons le concept de rite de passage – tel que définit par l’ethnologue Arnold Van Gennep –  au phénomène du voyage initiatique. Plus précisément, nous étudierons donc l’expérience du voyage ou quête initiatique, vécue en solitaire et dans une perspective ethnophilosophique. Ce voyage est perçu comme mode d’apprentissage expérientiel et mode d’éducation à l’altérité. Il s’inscrit dans des dimensions individuelles mais aussi collectives dans la mesure où la figure de ce voyageur – à la fois en quête et errant dans le voyage – se rattache à un groupe social et culture d’appartenance, dont il est séparé et qu’il retrouve au terme de son périple.  Dès lors, des rites de séparation et d’agrégation auront lieu, avant, au terme du voyage (en terre étrangère) et au retour du voyage (au sein du pays d’origine). De plus, le temps du voyage (le séjour) est associé au concept de rite de passage ; il est un moment privilégié durant lequel le voyageur, ayant perdu ses repères, est amené à se dépasser sous la contrainte de l’épreuve. En ce sens, nous tenterons de comprendre le phénomène de l’expérience du voyage initiatique, d’appréhender et de dévoiler les apprentissages et les dépassements de soi qu’il procure chez celui qui en est l’acteur ; mais également, nous étudierons, dans une perspective collective et sociale, les phases de départ et de retour au cours desquelles le voyageur éprouve une séparation vis-à-vis de son quotidien puis des retrouvailles et une réintégration dans son groupe d’appartenance.

Dès lors, ce travail portera essentiellement sur les dimensions symboliques et initiatiques du voyage, ainsi que sur les rites de passage qui marquent le déroulement de cette expérience.
Les dimensions du sacré et du profane seront explorées, celle du mythe, celles du rite et du rituel, celle de l’imaginaire ; et cela, avant, pendant et après le voyage.

Dans une première partie, les travaux d’Arnold Van Gennep et de Victor Turner sur les rites de passage seront présentés, mettant en relief leur invariable déroulement ; puis, dans une seconde partie, nous mènerons une réflexion critique sur l’expérience du voyage initiatique.


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1. LES RITES DE PASSAGE : CADRE THEORIQUE


1.1 Concepts clés : le rite, le rituel et le rite de passage      

Dans un premier temps, avant d’étudier la question des rites de passage, il est pertinent de présenter, dans un plus large cadre, les notions de rites et de rituels, qui sont réciproquement des outils et manifestations symboliques répondant à des questions fondamentales : D’où venons-nous ? Qui sommes-nous ? Où allons-nous ?

Bien que de nombreuses définitions et typologies aient été élaborées depuis plusieurs années, personne ne semble s’entendre sur une définition stricte du rite et du rituel. Aussi, l’élasticité de ces concepts donne aux chercheurs en sciences humaines et sociales une latitude pour étudier une multitude de situations, de manifestations et de phénomènes humains.

Selon Durkheim, « les rites sont des manières d’agir qui ne prennent naissance qu’au sein de groupes assemblés et qui sont destinés à susciter, à entretenir ou à faire renaître certains états mentaux de ces groupes ». (Durkheim, 1912, p.13). Plus précisément, les rites sont toujours considérés  « comme un ensemble de conduites individuelles ou collectives relativement codifiées, ayant un support corporel (verbal, gestuel, de posture), à caractère répétitif, à forte charge symbolique pour les acteurs et les témoins ». (Segalen, 1998, p.20-21).

Victor Turner (1990) voit dans le rituel une performance, compris dans le sens d’un « acte performatif » austinien ; mais il est aussi un jeu, une mise en scène, un « méta-théâtre » de la société sur elle-même. Les rituels visent à effectuer un travail sur les représentations collectives que partage un individu avec d’autres, soit la réalisation d’un travail réflexif. Ainsi, pour Turner, le rituel est avant tout un principe assurant la cohésion sociale et agissant sur les statuts pour les transformer. C’est là l’essence du rituel : tenter de résoudre les conflits, d’apaiser les tensions, de trouver des solutions aux maux de la société.

Les rites de passage, quant à eux, visent à modifier les statuts d’un individu ; ils permettent le passage d’un état à un autre. En effet, les rites de passage – tels que les rites d’initiation – célèbrent le changement de statut d’un individu à travers l’activation de symboles qui stimulent les émotions et permettent la transmission d’informations de façon non verbale, afin de rejoindre l’inconscient et la psychologie de l’individu.
Arnold Van Gennep distingue « une catégorie spéciale de Rites de passage, lesquels se décomposent à l’analyse en Rites de séparation, Rites de marge et Rites d’agrégation » (Van Gennep, 1981, p.14). Il propose de « nommer rites préliminaires les rites de séparation du monde antérieur, rites liminaire les rites exécutés pendant le stage de marge, et rites postliminaires les rites d’agrégation au monde nouveau » (Van Gennep, 1981, p.27).
Parlant de la situation de l’initié durant la phase de mise en marge, Van Gennep disait que l’initié était « matériellement et magico-religieusement, pendant un temps plus ou moins long, dans une situation spéciale : il flotte entre deux mondes » (Van Gennep, 1981, p.24).


1.2 L’invariable déroulement des rites de passage           

« Chez la plupart des peuples on retrouve des rites identiques en vue d’un but identique et dans toutes sortes de cérémonies » (Van Gennep, 1981, p.274). Selon Arnold Van Gennep, les trois phases du passage d’un état ou d’un statut culturellement défini à un autre sont la séparation, la marge et la réagrégation ; ou encore, en des termes repris par Victor Turner, le préliminaire, le liminaire et le postliminaire  (Turner, 1990, p.161). Plus précisément, les trois phases du rituel selon Van Gennep et Turner sont les suivantes : tout d’abord, la phase de séparation, qui est rupture avec le quotidien et la vie ordinaire ; puis la phase liminale, qui constitue le corps de l’acte rituel – cet entre-deux marqué par une absence de statut sera qualifié par Robert Hertz d’ « état transitoire » – (Hertz, 1970, p.1-83) – ; et enfin de la phase de réagrégation, qui vient clore le rituel : à cette troisième étape, le sujet rituel réintègre la vie normale et renaît avec un nouveau statut, avec un état de conscience plus élevé.

Dans son ouvrage intitulé « Le phénomène rituel », Victor Turner décrit les trois périodes qui marquent tous les rites de passages ou de « transition » : « La première période (de séparation) comprend un comportement symbolique qui signifie le détachement de l’individu ou du groupe par rapport soit à un point fixe antérieur dans la structure sociale, soit à un ensemble de conditions culturelles (un "état"), soit aux deux à la fois. Pendant la période "liminale" intermédiaire, les caractéristiques du sujet rituel (le "passager") sont ambigües ; il passe à travers un domaine culturel qui a peu ou aucun des attributs de l’état passé ou à venir. Dans la troisième période (réagrégation ou réintégration), le passage est consommé. Le sujet rituel, individu ou groupe constitué, est une fois de plus dans un état relativement stable et, en vertu de cela, a des droits et des obligations vis-à-vis des autres de type clairement défini et "structural" ; il est censé se comporter conformément à certaines normes coutumières et à certaines références éthiques qui s’imposent à ceux qui possèdent une position sociale dans un système de pareilles positions » (Turner, 1990, p.95-96).


1.2.1 Les rites de séparation, ou phase préliminaire

L’individu passe d’un monde familier, définitivement antérieur, à un monde nouveau. En ce sens, le rite de passage permet d’opérer une rupture dans le continuum espace-temps, d’apprivoiser les séparations nécessaires avec la communauté d’appartenance. Aussi, il y a mise en scène de moments rituels de purgation, de différenciation, de séparation, de protection, de renoncement, de sacrifice, etc. Durant cette phase, l’individu sort d’un temps profane pour passer à un instant sacré. Il se prépare à mourir symboliquement au monde profane, à pénétrer dans le monde du Sacré, dans ce monde extraordinaire d’où il renaîtra symboliquement. Cette sacralisation vient donc marquer un arrêt et un commencement, la fin d’un cycle et le début de la cérémonie.


1.2.2 Les rites de marge, ou phase liminaire

Platon disait déjà que « mourir, c’est être initié » (cité dans : Dupuis, 2005, p.19) ; en cela, la phase de marge est le temps de la mort symbolique du novice et de son initiation. Il est amené à des lieux où monde divin et monde profane se rejoignent : il se rend dans une île sacrée, il descend aux Enfers et, par une montagne sacrée, monte au ciel. Il se soumet à des rites d’entrée, qui montrent que le seuil de l’Autre monde est difficile à franchir. En ce temps liminal, le novice a un comportement passif, humble ; il est dans l’attente d’un enseignement, d’un message qui lui sera délivré ou d’un laborieux apprentissage. En somme, cette période est avant tout une révélation par laquelle l’initié deviendra un autre homme.
Sur le seuil, le novice gît dans une sorte d’entre-deux, sans appartenance à aucun monde institué, dans la suspension identitaire (de statut) et dans l’attente de reconnaissance. Dès lors, les distinctions de rang et de statut disparaissent ou sont homogénéisées. En ce sens, Turner dira que « le passage d’un statut moins élevé à un statut plus élevé se fait à travers les limbes d’une absence de statut » (Turner, 1990, p.98).
Néanmoins, des conventions sociales régissent le phénomène rituel : limites, interdits, simplification des relations sociales, etc. Pour Turner, l’état dans lequel est plongée la société lors du rituel correspond à un état d’ « anti-structure » qui répond par l’inverse à l’état structuré des relations dans le quotidien. Cet état d’ « anti-structure », il le nomme « communitas » et le définit comme une sociabilité où les rôles assumés par chacun dans la vie quotidienne sont suspendus, sociabilité qui est plutôt génératrice d’unité (Turner, 1990).


1.2.3 Les rites d’agrégation, ou phase postliminaire   

La troisième phase – c’est-à-dire la période de réagrégation et de réintégration – comporte les motifs de la nouvelle naissance ; elle marque le retour à la vie sociale, à la vie quotidienne et ordinaire. Ayant partagé une révélation, l’initié et ses pairs sont désormais « ceux qui savent » (Goguel d’Allondans, 2002, p.50). L’initié est reconnu socialement et accède à une identité sociale, à un nouveau statut. Cette accession à un nouvel état participe principalement de la cohésion sociale et de la survie du groupe. Néanmoins, le retour au quotidien s’effectuera de manière très différente selon le vécu de l’expérience, autrement dit en fonction des chocs culturels, émotionnels et cognitifs, selon la performance de chaque individu, selon l’interprétation que ce dernier fait de cette expérience et de ce qu’il en retire.
Selon Denis Jeffrey, « le mot symbole, du grec "sumbolon", désigne deux fragments d’une même pièce ou médaille servant de signe de reconnaissance lors de retrouvailles de deux personnes, le fragment que possède chaque personne est indispensable pour se faire reconnaître par l’autre, la fonction symbolique vise à tenir ensemble deux forces qui s’opposent » (Jeffrey, 1998, p.158). Dès lors, d’une part la quête de l’Autre et de l’Ailleurs – autrement dit le flirt avec le sacré – s’attache toujours à une dimension symbolique ; d’autre part, la phase de réintégration – des retrouvailles avec le quotidien, du retour dans le milieu social d’origine – est elle aussi fortement chargée de symbolisme.


1.3 La symbolique du passage : pivot de l’anthropologie de Van Gennep         

Arnold Van Gennep, par l’observation des ressemblances entre les rites de passage, quelle que soit les latitudes sous lesquelles ils se déroulent, les a classifié et en a dévoilé le caractère opératoire et universel de leur ordonnancement, soit une structure identique décomposée en trois phases. Il insiste tout particulièrement sur la séquence de la marge, autrement dit du seuil ou de l’entre-deux, puisque qu’elle se retrouve de façon plus ou moins prononcée dans toutes les cérémonies et puisqu’elle est un passage obligé avant toute réagrégation. De la sorte, il fit de la phase de marge – celle du passage symbolique et matériel – le point nodal de sa théorie. Au-delà des cérémonies observées dans les sociétés traditionnelles, il adaptera la structure des rites de passage à d’autres temps fort de l’existence des communautés humaines tels que les crises de vie que traverse une personne, le passage des saisons, les guerres et les paix, les apprentissages, …, mais aussi étendra sa méthodologie aux folklores populaires et régionaux. Dans une plus large perspective, le concept de rite de passage de Van Gennep n’ouvre pas seulement vers une compréhension historique et ethnographique des sociétés humaines, il permet aussi de percevoir nos rapports, complexes mais féconds, entre des pratiques individuelles et des pratiques collectives, nos manières de jouer notre existence dans les espaces du social, nos difficultés modernes à éduquer, à rencontrer et à transmettre.
Dès lors, dans quelle mesure pouvons-nous aujourd’hui étendre cette théorie des rites de passage à la mise en scène de la vie quotidienne dans nos sociétés dites modernes ? Il apparaît que le champ d’application de cette approche puisse s’étendre aux rites contemporains, ces derniers étant devenus des espaces de jeu et de cohésion sociale. Aussi, nous pourrions intégrer cette théorie aux politiques et programmes d’insertion, de réinsertion, et d’intégration sociale, mais également étudier comment l’appliquer à des phénomènes et projets individuels, aux voyages initiatiques, au sens de l’hospitalité, de la rencontre, etc.


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2. LE VOYAGE INITIATIQUE : REFLEXION CRITIQUE

« Un homme qui vit chez lui vit dans le profane ; il vit dans le sacré [il flirt avec] dès lors qu’il part en voyage et se trouve en qualité d’étranger à proximité d’un camp d’étrangers » (Van Gennep, 1981, p.16).


2.1 Contexte : le phénomène du voyage initiatique       

Sur le plan formel, de nombreux parallèles surgissent entre le voyage initiatique et le rituel, notamment la mise en scène et la scénarisation de l’action.
« Qu’est-ce qu’un voyage initiatique, demande Michel Serres (…) ? Un déplacement dans un espace symbolique muni d’une loi martiale : "perte de quelque chose et recouvrement avec supplément après retard … Rien, un instant, tout" » (Fabre, 2003, p.37). Dans le même esprit, reliant le voyage à l’initiation, Simone Vierne précise que « tout voyage est une quête du Graal, une aventure non pas humaine, mais sacrée. Il n’est pas seulement dépaysement, recherche d’exotisme, comparaison des mœurs et des cultures, il est passage dans une matrice, aux formes symboliques diverses, qui permet au voyageur d’acquérir non pas une sagesse – elle est donnée de surcroît – mais de changer totalement son statut ontologique, de renaître "autre". Il rejoint ainsi, ou mieux renouvelle, ce qui était un rite fondamental dans la mentalité archaïque, l’Initiation » (Vierne, 1972, p.37).

Comme nous l’évoquions précédemment, bien que les symboles associés à l’initiation varient selon les cultures et les époques, nous retrouvons, dans les voyages initiatiques, un même scénario de base. En effet, au cours de son périple, le novice est entraîné « vers la brousse, monde de l’informel, du chaos, des morts, dans la tombe, le ventre de la mère, du monstre, de la terre, dans le labyrinthe, dans les Enfers et/ou au Ciel » (Vierne, 1972, p.37). Il connaît une mort symbolique suivie d’une renaissance. En d’autres termes, le voyage initiatique participe d’un rite qui permet au voyageur de changer de statut ontologique. Le novice est arraché du monde profane et entraîné dans un monde qu’il ne connaissait pas. Ainsi, sous la contrainte des différentes épreuves qui jalonnent son parcours et par l’effort associé qu’il veut bien déployer, il sera instruit à l’origine du monde et aux lois de ce monde.


2.1.1 La mythologie des voyages

Comme des métaphores qui peuvent guider notre expérience, les mythes évoquent les schémas culturels profonds qui nous imprègnent en tant qu’êtres humains.

Il n’existe pas de voyage sans mythe du voyage préliminaire. Dans tout voyage, il y a une dimension initiatique, et dans tout voyage initiatique il y a une dimension mythique. Le voyage se construit et se fait aussi avant le départ. Il se rêve avant le départ : on s’invente un pays avant de s’y rendre (terres magnifiées, îles du bonheur, etc.) et on imagine ses habitants avant même de les rencontrer. Cela est déjà pleinement voyager ; c’est un voyage de l’esprit dans des univers imaginaires et fantastiques, à travers les mythes, en partant des mythes épiques, de l’Iliade et de l’Odyssée (épopées attribuée à Homère), en passant par les fables, les inventions, les fictions, etc. et à travers la littérature universelle (d’écrivains, de philosophes, d’explorateurs de l’antiquité, etc.), les récits légendaires, les voyages de Héros (tels que ceux d’Ulysse), les récits de voyage, etc.
Nombreux sont les mythes couramment véhiculés dans la vieille Europe à propos du nouveau monde, ou plus précisément des Amériques. « C’est de la ville de San Francisco de Quito, en Équateur, qu’arrivent, en 1534, les premiers échos d’un royaume fabuleux » (Magasich Airola et Beer, 1994, p.98). Le mythe de l’Eldorado, en filiation avec les concepts de Paradis perdu et de Terre promise, en est une illustration. Cette « expression [le mythe de l’Eldorado] donna son nom au plus célèbre des mythes américains et marque le départ d’innombrables expéditions vers le royaume imaginaire où était censé abonder ce métal aussi séduisant que diabolique [l’or] » (Magasich Airola et Beer, 1994, p.101).

Ainsi, les mythes – autour de l’Autre et de l’Ailleurs, de la quête et de la conquête – nourrissent l’imagination du voyageur avant même qu’il ne quitte sa terre natale, avant même que l’aventure en terre étrangère ne commence. Aussi, parce que la fonction d’ « élévation de l’homme » est celle qui caractérise le mieux le mythe (Eliade, 1966, p.178), alors l’homme puiserait dans ce dernier l’inspiration de ses projets existentiels et de voyage (la motivation, l’intention, l’initiative ; le courage, la force, la foi). En d’autres mots, ceux de Mircea Eliade, « Alors qu’ils paraîtraient voués à paralyser l’initiative humaine, en se présentant comme des modèles intangibles, les mythes incitent en réalité l’homme à créer, ils ouvrent continuellement de nouvelles perspectives à son esprit inventif. (Eliade, 1966, p.173). De la sorte, le voyageur moderne, dans le droit fil de l’explorateur d’autrefois, se met en route sous l’impulsion d’images et de mythes hautement mobilisateurs.
Au point 2.2 de ce travail, nous verrons comment, par le voyage, le rite (de passage) est l’expérience réelle (ou imaginaire) du mythe.


2.1.2 Le voyage initiatique comme mode d’éducation à l’altérité

Le voyage, qu’il soit envisagé dans un but déterminé ou qu’il soit errance et vagabondage, est-il source d’apprentissages ? Est-il une expérience formatrice ? S’inscrit-il dans une perspective de découverte et de connaissance de soi ? À ces questions, nous répondons spontanément par l’affirmative : oui, le voyage est le champ d’une expérience formatrice. Il constitue un moyen de partager et de récolter des connaissances, de se forger un esprit d’errance (ouvert et flexible), de développer une pensée dans l’action (la pensée nomade) et un esprit critique. En d’autres termes, oui, le voyage peut être considéré comme un mode d’apprentissage expérientiel, une voie à explorer, pour trouver un sens à son existence, pour apprendre à mieux se connaître, à mieux appréhender les diversités culturelles, humaines et de la nature.

C’est par l’expérience de la rencontre concrète avec l’Autre et avec un Ailleurs que le voyageur vit des chocs culturels, émotionnels et cognitifs. Les rencontres avec autrui, avec un univers inconnu ou étrange, seraient ainsi, en tant qu’épreuves et moments éprouvés, le support nécessaire à la formation du voyageur. À ce titre, les préjugés et stéréotypes de ce dernier se confrontent à la réalité telle qu’elle se présente ; il apprend à « voir autrement », à percevoir autrui dans une perspective différente, à prendre une distance par rapport à son univers culturel et symbolique d’origine. Dès lors, la rencontre d’autrui nécessite d’apprendre à jeter sur soi un regard extérieur et distancé, de nourrir une aptitude à la décentration et à l’intégration de l’Autre (Abdallah-Pretceille, 1997, p.123-132). C’est donc par l’exercice de la décentration que la rencontre avec l’Autre peut s’avérer des plus fructueuse. De plus, selon Emmanuel Lévinas, l’apprentissage de l’altérité exige une éthique, une éthique de l’altérité qui repose sur l’expérience d’autrui ; il précise également que le lien avec autrui ne se noue que comme responsabilité (Lévinas, 1982, p.92-93). Ainsi, l’éthique de l’altérité favorise la découverte et l’apprentissage de l’Autre, ainsi que le développement personnel (de la pensée, de l’agir relationnel...) de celui qui incarne cette éthique.

Voyager, s’éloigner de son chez soi, découvrir et explorer un Ailleurs dans la perspective d’acquérir une connaissance plus large et plus universelle implique que celui ou celle qui éprouve l’expérience du voyage – jalonnée d’épreuves, de rencontres interculturelles – devienne altéré, cela implique qu’il ou elle devienne une nouvelle personne. Autrement dit, l’expérience du voyage est créatrice d’un désordre porteur d’un renouveau ; elle est riche d’apprentissages issus d’un vécu au-delà de ses frontières, au-delà du connu.
En somme, le voyage donne sens à l’existence et participe à la construction d’une identité nouvelle. Par conséquent, en tant qu’espace d’initiation, il est source d’évolution de la conscience, d’adaptations voire de transformations intérieures. Ce déploiement de l’esprit s’inscrit dans un processus en trois temps qui sera présenté dans la suite de ce travail : avant (l’expérience possible), pendant (l’expérience concrète) et après (l’expérience du retour, le nouveau départ).


2.2 Le voyage initiatique e(s)t le rite de passage           

Préalablement, avant de tisser les liens entre le voyage initiatique et le rite de passage, précisons la perspective dans laquelle sont perçus le phénomène d’initiation et les rôles tenus par l’initiateur et l’initié. L’initiateur – le père initiatique – est symbolisé par le voyage et par l’altérité. L’initié, quant à lui, est le voyageur ; nous pouvons également le nommer l’élève, l’apprenti en quête ou encore l’apprenti philosophe. En ce sens, le voyageur, sans repère dans un ailleurs inconnu ou du moins étrange, erre et se confronte à l’Autre et aux épreuves que le voyage met sur son passage. Aussi, le voyage sera vu comme un rituel de passage pour le voyageur, un rituel qu’il met lui-même en scène, mais également un rituel qui est, en quelque sorte, conceptuellement, mis en scène par l’altérité. Dès lors, ce voyage est un mode d’éducation à l’altérité dont l’enseignant serait l’autre, l’ailleurs, l’inconnu, l’étrange. Il est nécessairement symbolisé par l’Autre, dans sa pleine et totale altérité, par les autres qui, chacun à leur tour ou en simultanéité, joueraient le rôle de l’initiateur et viendraient altérer voire transformer le voyageur. Au terme du voyage, au retour dans son pays d’origine, le voyageur deviendra l’initiateur pour le groupe social et culturel auquel il se rattache. Il sera celui qui a vagué sur d’autres horizons, qui a découvert et exploré un ailleurs, et à ce titre, aura un nouvel apprentissage expérientiel à transmettre. En d’autres termes, il aura un « plus » à partager, une autre vision du monde à communiquer et à révéler aux membres de son groupe d’appartenance.


2.2.1 Le centre commun entre le rite et le voyage

Le voyage est une école de la vie pour les uns, une étape vers la dérive ou une quête du nécessaire pour vivre pour les autres. Par l’expérience du voyage, il y en a qui construisent leur avenir tandis que l’autres déconstruisent leur présent. Dans un cas, comme dans l’autre, le voyage est perçu comme un mode d’apprentissage expérientiel qui donne sens à l’existence et transforme les identités. Il est un passage dans le parcours de vie et peut être l’occasion pour certains individus de se dévoiler à eux-mêmes.

Dès lors, dans quelle mesure pouvons-nous assimiler le voyage initiatique à un rite et, plus spécifiquement, à un rite de passage ?

Il n’est pas évident de rapprocher toutes les caractéristiques fondamentales du rite à celles de l’expérience du voyage. En effet, de premier abord, nous pourrions être portés à avancer que le voyage est un événement ponctuel et non répété, et sous certains angles cela pourrait se vérifier. Par exemple, le voyage touristique peut être envisagé comme un simple moyen (non comme une finalité) de s’évader provisoirement d’un quotidien trop envahissant, sans pour autant être source d’ouverture à l’Autre, d’apprentissages existentiels, et encore moins de transformations identitaires. Néanmoins, comme une cérémonie de mariage (autrement dit un rite), le voyage peut être perçu et vécu comme un événement (assimilé à une épreuve) par lequel on s’engage pour marquer une évolution existentielle. En ce même sens, à la fin de leurs études, de multiples jeunes décident de parfaire leur formation par un voyage, par une découverte du monde source d’ouverture à l’altérité et d’apprentissage expérientiel. Certains explorent un ailleurs dans le but d’accomplir un exploit nourri de rencontres humaines, d’autres s’aventurent dans le domaine de l’humanitaire, d’autres encore (les travellers) voyagent pour voyager, etc. De plus, un voyage peut être, comme un rite, fortement formalisé : tout voyage, même un voyage dans l’errance, nécessite une préparation, une organisation, ne serait-ce que minimale. Avant le départ, le voyage exige des prédispositions d’esprit et matérielles, au même titre que le rite recours à une série d’objets et de signes emblématiques, à des systèmes de comportements et de langages spécifiques. Ainsi, avant le départ, le voyageur met à jour des passeports, vaccins, visas et rempli d’autres formalités administratives, mais aussi se prédispose aux conditions de vie de ses hôtes. En d’autres mots, peu importe le mode de mobilité envisagé et le lieu exploré, en terre étrangère, le voyageur devra s’adapter aux conditions ou exigences collectives en termes de communication (langues, coutumes, pratiques, …), de transport, etc.
En résumé, le rite de passage (ou d’initiation), comme le voyage initiatique, est porteur d’une dimension symbolique ; tous deux ont comme trait commun d’être une expérience en marge de la vie quotidienne, en un monde sacré, en un espace-temps extra-ordinaire. Ils sont d’une part en rupture avec le cours ordinaire de l’existence et d’autre part s’y (ré)intègre pleinement ; l’un comme l’autre sont producteurs de sens ; ils sont l’occasion de partager une connaissance et impliquent des interactions – les trois sphères de la relation étant, selon Buber, les hommes, la nature et les idées ou essences spirituelles (Buber, 1938). Mais aussi et surtout, tous deux transcendent, dépassent leurs sujets pour ensuite que ces derniers se dévoilent ; autrement dit, dans un même temps, par le jeu de l’épreuve, ils contraignent et servent leurs sujets.
Sur ce dernier point, je souhaiterais m’attarder tout particulièrement. En effet, puisque chaque apprentissage initiatique résulte d’une mise à l’épreuve et de son dépassement, alors il convient d’étudier ce phénomène qu’est la contrainte de l’épreuve symbolique. Au fil du voyage initiatique, diverses réactions émotionnelles ou physiques peuvent être associées aux épreuves : le choc (culturel, émotionnel, cognitif), la peur, la souffrance corporelle ou psychologique, le rapport à la mort, la question de la survie, le traumatisme, etc. Aussi, le voyageur doit, parmi toutes ces embûches, se frayer un passage. Il doit franchir ou contourner des obstacles, traverser des épreuves, entrer et sortir, ouvrir et fermer des portes, grimper des murs ou forcer des barrages. Et il y arrivera dépendamment de son courage, de sa persévérance et de sa résilience[2]. De plus, dans la mesure où « nous ne pouvons nous élever au-dessus de nous-mêmes que par un effort plus ou moins pénible » (Durkheim, 1922), alors nous pouvons concevoir le fait que la mise à l’épreuve ne vise pas la destruction mais bien le dépassement. En d’autres termes, les épreuves et les conflits permettent à l’individu – et dans le cas présent au voyageur – de s’initier à la vie, de s’éduquer, de repousser ses limites, de s’adapter voire de se transformer, de structurer et de faire évoluer sa conscience.

Finalement, après avoir effectué ces juxtapositions entre rite et voyage, il s’avère que le voyage initiatique peut être assimilé à un passage marquant le cours de la vie, autrement dit un moment fort de l’existence. Aussi, Ortiz dira que le voyageur est « quelqu’un qui se trouve suspendu entre ces deux repères qui balisent son parcours. Dans ce sens, le voyage se rapproche des rites de passage » (Ortiz, 1996, p.72).

2.2.2 Les trois phases du  voyage initiatique

Dans ce cadre de réflexion sur l’expérience du voyage initiatique, le rite – au caractère collectif – est a priori bien plus présent durant les phases de séparation et d’agrégation, car pendant ces étapes d’avant et d’après le voyage (l’éloignement puis le retour à la réalité sociale), le voyageur est auprès des siens, de son groupe d’appartenance ; il communique avec eux sur le sens de son voyage, puis sur son vécu de voyageur et sur les apprentissages qu’il a tiré de son périple. Ainsi, « le partage [d’émotions et d’expériences] permet l’affirmation d’une appartenance symbolique » (Jodelet, 2003). En ce sens, les rites, notamment ceux de séparation et de réagrégation, peuvent devenir source de cohésion sociale.
Toutefois, le voyage (dans l’ailleurs) est uniquement mise en marge pour le voyageur. En effet, cette phase, sur le seuil, n’est pas ritualisée par des membres du groupe culturel et social d’origine du voyageur puisque ce dernier en est distancé, puisque cette aventure solitaire est détachée de la vie quotidienne et ordinaire.
Par contre, bien qu’il soit séparé de son collectif – ou groupe d’appartenance – d’origine, pendant le voyage, le voyageur peut intentionnellement agir de manière rituelle et collective, pour apprendre et pour connaître, pour ensuite partager à son retour ce qu’il aura découvert. En effet, nous pouvons observer des manifestations et pratiques rituelles pendant le voyage. Par exemple, de sa propre initiative, le voyageur pourra, systématiquement goûter à la gastronomie traditionnelle des différent lieux traversés, rencontrer les populations locales et apprendre à les connaître, s’intéresser à leurs idées et les intégrer à sa pensée, s’immiscer dans leurs modes de vie, participer à leurs activités quotidiennes, etc. S’il est sensible à la nature, à sa diversité et à sa beauté, alors il pourra prendre le temps de la contempler et de l’apprécier ; il pourra répéter cette activité (rituelle) de contemplation autant de fois qu’il en ressentira le besoin ou l’envie. Cette action le rapprochera intimement de la nature, de la même manière que le rite rapproche les êtres et permet la cohésion sociale. En cela, le voyageur « ne se contente plus d’être acteur, il prétend à être auteur à chaque étape, à chaque crise, à chaque passage de sa vie » (Goguel d’Allondans, 2002, p.64).

Nous distinguerons ci-après les différentes phases du voyage qui correspondent aux rites de passage définis par l’ethnologue Arnold Van Gennep. Appliquées au voyage, ces trois séquences rituelles s’articulent de la manière suivante :
1. La séparation (la phase préliminaire) = les rituels de départ,
2. L’initiation (la phase liminaire) = le temps du voyage, du séjour,
3. La réintégration-agrégation (la phase postliminaire) = le retour à la vie ordinaire.

Formulé autrement, c’est à travers les notions de voyage, de quête, de passage, d’évolution et à travers un symbolisme que s’élaborent ces trois mêmes étapes, celles de toute initiation :
1. Se préparer et se séparer, 2. Découvrir, 3. Revenir et communiquer.

---       La séparation (la phase préliminaire) = les rituels de départ

Selon Ortiz, le voyage « implique la séparation de l’individu de son milieu familial, ensuite, d’un séjour prolongé on the road, pour enfin le réintégrer dans sa propre maison, dans sa terre d’origine » (Ortiz, 1996, p.72). Cette première séparation, soit la phase précédant le départ, se définie par le détachement de l’individu vis-à-vis de sa quotidienneté, de son univers de vie culturelle et sociale de tous les jours. Elle est marquée par un désir de l’ailleurs, par un besoin d’évasion et par une double volonté : celle d’une séparation et celle d’une quête, puis par un déplacement – le départ, le vol, le transit, le passage de frontières, l’arrivée sont en quelque sorte des rites de passage – et enfin par un sentiment d’émancipation et de libération une fois arrivée à la destination souhaitée.
Le départ provoque une disparition, tout au moins provisoire. Les actes rituels entourant le départ du voyageur tentent d’exorciser la menace d’une séparation, d’une rupture qui peut être cassure sans retour. En ce sens, les gestes rituels et cérémonies précédant le départ visent à conjurer une double menace du départ, la disparition et l’altération du voyageur. Ils ont pour effet d’apaiser les tensions liées à la séparation et de rendre le temps propice au voyage.
Par ailleurs, le rituel du départ manifeste un besoin de cohésion sociale, le désir de tous ceux qui restent de rester unis, de combler immédiatement le manque provoqué par la séparation.
Le néophyte quitte alors un monde pour en découvrir un tout autre, nouveau et souvent déroutant. Il quitte son état d’avant, profane et ordinaire, pour tenter d’être admis dans un monde sacré et extraordinaire, éloigné de ses repères habituels, généralement confortables et sédentaires. Autrement dit, la phase de séparation marque le passage de la sphère du profane, c’est-à-dire celle de la vie quotidienne, dans la sphère du sacré. Ainsi, lors de la séparation, le voyageur apparaît comme un être d’exception, un individu qui s’apprête à pénétrer un espace sacré, autant merveilleux que périlleux.

---       L’initiation (la phase liminaire) = le temps du voyage, du séjour

Après avoir décidé résolument d’entreprendre un voyage initiatique, de s’engager dans une quête en solitaire, après avoir éprouvé la séparation (le départ), le voyageur  se confronte à un seuil entre connu et inconnu ; il est conduit à sortir de sa zone de confort pour entrer dans l’inconnu, c’est-à-dire dans une zone sacrée. Au sein de ce nouveau cadre de vie, qui ne donne aucune garantie ; il doit faire preuve de courage pour affronter les épreuves qui se présentent à lui.
Dès lors, l’initiation est le temps du voyage : c’est le moment privilégié de l’expérience non-ordinaire, au cours de laquelle le voyageur vit, agit, mange autrement, part à la rencontre de l’Autre. Au cours de cette séquence, le voyageur n’est plus tout à fait lui-même et quitte temporairement ses habitudes mais aussi ses codes de conduite en société. L’Ailleurs étant source de vertige, ses repères culturels sont bouleversés. Aussi, Goguel d’Allondans dira que « le passage est un temps de marge, et la marge, comme le marginal, reste le lieu de toutes les potentialités » (Goguel d’Allondans, 2002, p.65).
Cet entre-deux, ou stage intermédiaire dans l’au-delà, est symbolisé par la mort initiatique du voyageur. Mais avant de renaître symboliquement, le voyageur aura à traverser le seuil, à se soumettre à des rites d’entrée et de sortie, à faire face et à dépasser le lot d’épreuves intermédiaires qui jalonneront son parcours.
En bref, dans le voyage, se produisent des états d’effervescence qui changent les conditions de la vie psychique. Le voyageur éprouve une autre réalité, de nouvelles rencontres et s’ouvre vers de nouveaux horizons. En cela, il évolue et peut même se transformer.

---       La réintégration-agrégation (la phase postliminaire) = le retour à la vie ordinaire

- L’accomplissement de la quête et la transformation : Au terme de son périple initiatique, le voyageur retrouve son pays d’origine et son groupe d’appartenance. Il est une personne en voie de réintégration dans un monde familier, aux règles connues, qu’est le chez-soi. Néanmoins, il y a un plus qui n’était pas auparavant, ce plus – le fruit de l’expérience du voyage – est contenu dans l’être et dans l’esprit de celui qui a voyagé ; ce sont les apprentissages, les révélations, les transformations intérieures. Aussi, le voyageur réalise le décalage entre son état, modifié par l’expérience affective du voyage, et le quotidien qu’il retrouve. Les expériences uniques qu’il a vécues ont fait de lui un autre homme, un homme différent de celui qui est parti. En d’autres termes, il est une personne transformée, qui renaît dans un nouvel état, avec un nouveau statut, avec un niveau de conscience plus élevé.

- Le voyage se prolonge au-delà de sa fin : Une fois terminée, le voyage se poursuit sous d’autres manières que le déplacement dans l’autre lieu géographique. La réintégration n’est pas toujours aisée et peut être douloureuse dans la mesure où elle est d’abord marquée par le retour à la morale et à un ordre social. Par exemple, le retour au travail peut s’accompagner d’une période de déprime. Toutefois, ce temps de réintégration est également le temps de la maturation, du mûrissement, celui des approfondissements, celui de la sagesse qui s’acquière dans la durée.
Au cours de cette séquence, les apprentissages expérientiels issus du voyage s’intègrent et s’expriment graduellement dans le cours de la vie ordinaire. Pour l’initié, cette phase postliminaire est un temps propice pour partager avec son groupe d’appartenance, les nouvelles connaissances glanées pendant le voyage. Aussi, le retour d’un voyage est souvent célébré. Les récits du voyageur prolongent dans le temps un périple qui sinon tomberait dans l’oubli. Ils permettent à la communauté de participer aux profits des découvertes et des apprentissages expérientiels. Ces récits, qu’ils soient vérités ou fabulations, perçus et interprétés en fonction d’un imaginaire symbolique tant individuel que collectif, contribuent à fonder et à enrichir un regard sur l’Autre, sur l’Ailleurs.
Finalement, le voyage, comme le rituel, a une fonction de cohésion sociale : par son aspect de reliance, il donne à communiquer, à échanger et à mettre en commun. Comme le rite, qui a pour but de rattacher le présent au passé, de rattacher l’individu à la communauté, il permet à un groupe social d’apprendre et d’évoluer. En d’autres mots, le voyage forge les capacités individuelles du voyageur lui-même mais aussi celle de la collectivité toute entière.


2.3 Le voyage initiatique : un pont symbolique entre les cultures          

Selon Denis Jeffrey, « Les hommes sont les uns pour les autres un îlot inconnu qui se rattache aux autres îlots par des ponts symboliques. Ces ponts renvoient, entre autres, aux rituels d’initiation, d’accueil, d’hospitalité et de rencontre ». (Jeffrey, 1998). Aussi, ces ponts renvoient au voyage et à la communication interculturelle. En effet, par le voyage, l’individu aspire à se fondre – sans se confondre – dans la culture de l’Autre. En s’ouvrant à autrui, le voyageur s’apprête à adopter les modes d’être, de penser et d’agir de l’Autre, mais aussi à rompre avec son quotidien, ses habitudes et ses réflexes ; autrement dit, il ose douter de ses pratiques et pensées les plus courantes et s’imprègne de celles des autres.

C’est sur ces voies de passage que s’expriment les voix les plus sages, celles qui ne renoncent jamais et continuent d’ouvrir des portes, de franchir de nouveaux horizons. Pour de nombreux jeunes désorientés au cœur de nos sociétés hypermodernes, les rites de passage et d’initiation sont à comprendre et à encourager. Nous pourrions trouver en ces rites de nouveaux îlots de sens et des pistes d’orientation dans la mesure où « le rite de passage permet de couper, de se séparer, donc de décider, d’opérer des choix » (Goguel d’Allondans, 2002, p.134). Aussi, puisqu’il favorise le dépassement de soi, l’évolution de la conscience, la transformation identitaire, la connaissance de soi et de l’autre, le voyage initiatique se présente comme un chemin à explorer afin de redonner du sens à l’apprentissage expérientiel.

En somme, un passage par l’Ailleurs, ou un voyage dans l’Ailleurs, permet d’une part, de s’éduquer à l’altérité et donc aider à la cohabitation les cultures ; d’autre part, il permet de redonner du sens à nos rites, à nos mythes, à nos symboles, … à nos vies. Néanmoins, dans le voyage, c’est-à-dire pendant de la phase de marge, tout nous semble soudainement possible puisqu’il n’y a plus de barrières, ou du moins plus les mêmes barrières. Dès lors, cette liberté, bien qu’elle ouvre la porte aux aventures les plus formidables, peut aussi mener aux excès les plus déplorables. Par conséquent, se justifie la pertinence d’instaurer des formes d’éducation à l’altérité, pour aider au rapprochement des cultures, au respect d’autrui et de la nature.


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CONCLUSION


Comme nous venons de l’observer, les rites, comme les voyages, permettent d’appréhender la mort, de construire des ponts symboliques, de découvrir et de partager, de relier les êtres humains entre eux, de fortifier une communauté humaine au nom du principe vital selon lequel tous les individus qui la composent demeurent par essence à la fois égaux et néanmoins différents.

En conclusion, par l’étude du phénomène de la quête initiatique et de l’expérience de la rencontre symbolique dans l’ailleurs, nous pouvons convenir que le voyage est un mode d’éducation à l’altérité. Puisqu’il est détachement de la vie quotidienne et mise en marge, puisqu’il suscite le dépassement d’épreuves et de soi, il se définit également comme un rite de passage. Ainsi, les voyages initiatiques constituent des étapes marquant le parcours d’une vie. Ils occasionnent le passage d’un statut à un autre. Ils permettent l’accès à de nouveaux états de conscience, autrement dit une évolution de la conscience.


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LEXIQUE

Communitas.  « Essentiellement, la communitas est une relation entre des individus concrets, historiques, idiosyncratiques. Ces individus ne sont pas répartis par segments, dans des rôles et des statuts, mais sont plutôt en présence les uns des autres à la manière du "Je et Tu" de Martin Buber. (…). Mais la spontanéité et l’immédiateté de la communitas – par opposition au caractère juridico-politique de la structure – peut rarement se maintenir très longtemps. La communitas elle-même engendre vite une structure dans laquelle les relations libres entre individus sont transformées en relations régies par des normes entre partenaires sociaux » (Turner, 1990, p.129-130).

Imagination.  « L’imagination se définit comme une "réaction défensive de la nature contre la représentation, par l’intelligence, de l’inévitabilité de la mort" » (Durand, 1984, p.117). « L’imagination symbolique est un facteur d’équilibre psychosocial » (Durand, 1984, p.119).

Initiation.  « L’initiation est, au sens large, l’accès à une connaissance qui ne saurait être transmise sans un long processus : initiation à une technique, aux arcanes d’un savoir. Dans une acceptation plus spécifique, on désigne par initiation l’ensemble des rites qui marquent (ou marquaient jadis) en de nombreux groupes l’accès des enfants à l’identité sociale d’un adulte. (…). A l’initiation, s’applique en général l’analyse de Van Gennep : séparation, marge, agrégation » (Laburthe-Tolra et Warnier, 2003, p.178).

Mythe. « Les mythes sont des récits fondateurs, histoires des dieux ou des choses, qui fournissent un ensemble de représentations des rapports du monde et de l’humanité avec les êtres invisibles, oscillant entre la légende et la science, le mythe est déjà une mise en ordre rationnel. (…). Les mythes entraînent des attitudes communautaires ou religieuses, voire mystiques » (Laburthe-Tolra et Warnier, 2003, p.175-176).

Rite.  « Ce qui fait la force du rite, ce n’est sans doute en effet ni son sens intrinsèque, ni son efficacité pratique, ni la sécurité subjective qu’il procure, mais le fait qu’il transforme la situation en renforçant la solidarité du groupe qui l’exécute » (Laburthe-Tolra et Warnier, 2003, p.177).
« Le rite ou rituel est un ensemble d’actes formalisés, expressifs, porteurs d’une dimension symbolique. Le rite est caractérisé par une configuration spatio-temporelle spécifique, par le recours à une série d’objets, par des systèmes de comportements et de langages spécifiques, par des signes emblématiques dont le sens codé constitue l’un des biens communs d’un groupe. (…). Les rites sont toujours considérés comme un ensemble de conduites individuelles ou collectives relativement codifiées, ayant un support corporel (verbal, gestuel, de posture), à caractère répétitif, à forte charge symbolique pour les acteurs et les témoins ». (Segalen, 1998, p.20-21).

Rite de passage.  Les rites de passage « sont ceux qui président aux grands "passages" et qui marquent les temps forts de l’existence : naissance, initiation, mariage, mort. Van Gennep a montré qu’ils obéissent à une logique universelle, quelle que soit leur diversité. Ils s’emploient à séparer des individus d’un statut pour leur en conférer un autre ; entre ces deux moments, se situe une période intermédiaire de "marge" ou l’individu, parfois selon des modalités très étranges, connaît une sorte de mort suivie d’une résurrection. Le rite crée ainsi un état neuf, souvent doué d’un nouveau nom, et instruit d’un secret initiatique qui n’a guère d’autre but que d’assurer la solidarité et la soumission sociales » (Laburthe-Tolra et Warnier, 2003, p.177-178).
Arnold Van Gennep définit les rites de passage comme « des rites qui accompagnent chaque changement de lieu, d’état, de position sociale et d’âge » (Turner, 1990, p.95).
« Le rite de passage cherche à recomposer l’ordre social » (Segalen, 1998, p.29). « Les passages (…) se concrétisent dans un saut, passage du seuil ou sous un portique » (Segalen, 1998, p.32).
Julian Pitt-Rivers donne un exemple de rite de passage moderne, celui des premiers voyages aériens au cours desquels on pouvait identifier les stades de séparation d’avec le monde, de marge, puis de réintégration : « Des gestes spécifiques mettent en place cette structure sur un double registre : d’abord, pour mieux affirmer l’importance de l’État-Nation à laquelle appartient la compagnie d’aviation emprunté par le passager, et en second lieu, pour véritablement séparer celui-ci du monde profane et de le faire accéder au "sacré" de l’espace aérien. Du premier champ relèvent les annonces en langue nationale, le costume spécial des hôtesses de l’air, le contrôle méticuleux des passeports, etc. Du second, la séparation des passagers contrôlés, le service de repas par la compagnie, la solennité de la hiérarchie de l’équipage, etc. » (Segalen, 1998, p.34). 

Sacré.  « Le sacré s’oppose au profane, et désigne ce qui possède un vrai sens "ailleurs" que dans le monde immédiat de l’apparence. (…). Pour Cazeneuve, le sacré correspond à ce qui est hors du normal, l’impureté et la souillure rejoignant ainsi la sainteté. (…). Étymologiquement, saint et sacré signifient "séparé, mis à l’écart" » (Laburthe-Tolra et Warnier, 2003, p.167-168).

Symbole.  « Le symbole est indifféremment image ou mot dérivant d’un processus complexe de représentation et de signification qui met en jeu tout l’appareillage opératoire des sciences de l’homme. Le substrat imagé du symbole est doté d’un nœud de sens (ce qui suppose pour son décryptage une herméneutique ou méthode d’interprétation) » (Dubois, 2001, p.11).

Symbolique.  « Le symbolique, au sens le plus englobant et vague, est (…) l’ensemble des phénomène de signification pour autant que ce sont des phénomènes sociaux » (Laburthe-Tolra et Warnier, 2003, p.159).
« Un phénomène est qualifié de "symbolique" si l’expérience que nous en avons est décrite dans le contexte de la communication inter-humaine. La notion d’ "ordre symbolique", qui a été introduite par Lévi-Strauss, désigne […] la représentation qu’a le sujet d’ "un univers de règles" dont l’existence et l’efficacité sociale sont subordonnées à la connaissance et à l’adhésion des partenaires sociaux » (Pottier, 1994, p.22).


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[1] telles sont les sphères de relation définies par Martin Buber (Buber, 1938, Je et Tu, Chapitre I : Les mots-principes).
[2] Capacité à surmonter les traumatismes et à dépasser les épreuves douloureuses de l’existence (Boris Cyrulnik, 2003).

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